L’Algérie a refusé vendredi pour la deuxième fois consécutive de participer au vote sur le projet de résolution portant renouvellement du mandat de la MINURSO, et ce, bien qu’ayant réussi, en tant que membre du Conseil de sécurité, à faire évoluer le texte initial de manière substantielle.
Après de longues consultations avec les différents membres du Conseil de sécurité à New York et dans les capitales de leurs pays, ayant conduit au report de la séance de vote, l’Algérie est parvenue à transformer un projet de résolution proposé par les Etats-Unis d’Amérique au Conseil de sécurité, qui visait dans les faits à liquider la question sahraouie, en une résolution plus équilibrée réaffirmant les principes fondamentaux du droit international et de la Charte des Nations Unies, notamment le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination, ainsi que les paramètres fondamentaux d’une solution juste du conflit.
Les Etats-Unis d’Amérique, en leur qualité de "porte-plume", avaient présenté, le 22 octobre 2025, un projet de résolution reflétant une position ouvertement en faveur du Maroc. Ce texte voulait imposer une solution unilatérale fondée sur la proposition d’autonomie comme unique option, en contrepartie de sa normalisation et de son soutien à l’entité sioniste, notamment dans la guerre d’extermination menée contre le peuple palestinien à Ghaza.
Le texte initial décrivait la proposition d’autonomie comme "base la plus crédible" et "solution la plus réaliste", allant jusqu’à la considérer comme "unique cadre de négociation". Il proposait, en outre, de proroger le mandat de la MINURSO de seulement trois (3) mois, dans une tentative d’imposer le fait accompli, de mettre fin au rôle de la mission onusienne et de la transformer en simple mécanisme politique chargé d’appliquer la thèse de l’autonomie.
Mais, grâce aux efforts soutenus de l’Algérie et aux consultations qu’elle a menées avec les différentes parties, des améliorations substantielles ont été apportées au texte initial à travers deux révisions successives, aboutissant au texte final présenté la veille même de la séance de vote reportée. Ces modifications concernent quatre (4) axes principaux qui ont permis de rééquilibrer le processus politique.
Le premier axe est que la solution doit impérativement passer par le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination. En effet, l’Algérie a réussi à dissocier ce droit du plan d’autonomie, tel qu’il figurait dans le texte initial. La nouvelle formulation souligne la nécessité de parvenir à "une solution politique définitive, mutuellement acceptable, garantissant au peuple du Sahara occidental son droit à l’autodétermination", faisant ainsi de ce droit un objectif fondamental en soi, et non plus une conséquence secondaire d’une option prédéterminée.
A cet effet, un amendement essentiel a été introduit, appelant l’Envoyé personnel du Secrétaire général des Nations Unies à "mettre en œuvre les résolutions antérieures du Conseil de sécurité", replaçant ainsi le processus politique dans son cadre juridique originel.Quant au deuxième axe, il affirme que la solution doit être conforme à la Charte des Nations Unies. Après plusieurs rounds de négociations, l’Algérie a réussi à modifier le projet de résolution qui imposait initialement la thèse marocaine comme unique base de la solution au Sahara occidental.
Selon le texte final adopté, la solution définitive doit être mutuellement acceptable et conforme aux buts et principes de la Charte des Nations Unies, tout en garantissant le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination.
Le troisième axe concerne le recul de "l’autonomie" comme unique option, les références à cette proposition marocaine ayant nettement reculé dans la version finale. Alors que le projet initial la qualifiait de "cadre unique", le texte final la décrit comme simple "base" de discussions, soulignant qu’elle "peut représenter" une solution envisageable, et non pas l’unique solution.
La résolution finale a également ajouté un paragraphe accueillant favorablement "toute proposition constructive des deux parties", ouvrant officiellement la voie à d’autres options et plaçant la proposition du Front Polisario sur la table des négociations.
Le quatrième axe concerne l’importance du rôle de la MINURSO. L’une des améliorations substantielles obtenues a été la prorogation du mandat de la MINURSO pour une année complète, jusqu’au 31 octobre 2026, contre seulement trois mois dans la version initiale, ce qui contredit les objectifs pour lesquels a œuvré le Maroc, qui a toujours remis en cause la MINURSO pour écarter l’option référendaire et promouvoir l’autonomie comme solution unique et définitive.
Cette prorogation d’une année constitue une réaffirmation claire de l’importance du rôle de la MINURSO dans le soutien au processus politique et la préservation de la stabilité dans la région, tel que mentionné dans le texte final, qui insiste sur "l’importance de respecter le cessez-le-feu et d’éviter toute action susceptible de compromettre le processus politique".
Dans le même contexte, le passage menaçant de mettre fin au mandat de la MINURSO a été supprimé et remplacé par une demande de "révision stratégique" de son mandat, lequel dépendra des orientations du Secrétaire général des Nations Unies et de la capacité des deux parties de parvenir à une solution politique acceptable garantissant au peuple sahraoui son droit à l’autodétermination.
Le Front Polisario exprime son mécontentement
Le Front Polisario a réaffirmé l’attachement ferme du peuple sahraoui à son droit inaliénable à l’autodétermination et à l’indépendance, soulignant que la résolution 2797 votée vendredi par le Conseil de sécurité contenait des éléments qui s’éloignent dangereusement des fondements adoptés par le Conseil dans le traitement de la question du Sahara occidental, conformément aux principes fondamentaux inscrits dans la Charte des Nations unies.
Dans un communiqué publié à l’issue de l’adoption par le Conseil de sécurité de la résolution 2797 (2025), qui a décidé entre autres de prolonger le mandat de la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO) jusqu’au 31 octobre 2026, le Front Polisario a indiqué que cette dernière violait le statut international du Sahara occidental en tant que territoire de décolonisation, compromettait les fondements du processus de paix parrainé par l’ONU au Sahara occidental et entravait les efforts du Secrétaire général de l’ONU et de son Envoyé personnel.
En outre, poursuit le communiqué, la résolution ne tient pas compte, ni traite efficacement, toutes les questions de fond soulevées par la majorité des membres du Conseil de sécurité ainsi que par le Front Polisario.
"Le Front Polisario est le seul représentant légitime et la seule voix du peuple sahraoui, qui est descendu dans la rue ces jours-ci partout dans le monde pour manifester massivement, pour affirmer haut et fort son attachement indéfectible à son droit à l’autodétermination et à l’indépendance, et à la défense de ses droits et de sa souveraineté par tous les moyens légitimes", rappelle le communiqué.
Réaffirmant sa volonté de participer de manière constructive au processus de paix parrainé par l’ONU au Sahara occidental, le Front Polisario a souligné qu’il ne sera partie prenante à aucun processus politique ni à aucune négociation fondée sur des "propositions" visant à "légitimer" l’occupation militaire marocaine illégale du Sahara occidental et à priver le peuple sahraoui de son droit inaliénable, non négociable et imprescriptible à l’autodétermination et à la souveraineté sur sa patrie.
Dans ce contexte, il a rappelé avoir soumis une proposition au Secrétaire général de l’ONU le 10 avril 2007, laquelle a été prise en compte par le Conseil de sécurité dans sa résolution 1754 (2007) et dans les résolutions ultérieures. Il a également soumis une version élargie de sa proposition de 2007 au Secrétaire général de l’ONU le 20 octobre 2005, témoignant ainsi de son engagement sincère en faveur d’une paix juste et durable.
Enfin, le Front Polisario a affirmé que "les approches unilatérales qui cherchent à sacrifier l’Etat de droit, la justice et la paix à des gains politiques à court terme ne feront qu’exacerber le conflit et compromettre la paix, la sécurité et la stabilité dans toute la région".
Par ailleurs, il a estimé que la prorogation du mandat de la MINURSO témoigne de l’engagement constant du Conseil de sécurité à trouver une solution juste et durable, conformément à ses résolutions pertinentes sur le Sahara occidental, soulignant que le conflit ne peut être résolu sans le peuple sahraoui et sans l’exercice de son droit inaliénable à l’autodétermination.
"C’est une réponse claire aux tentatives de l’Etat occupant marocain qui, avec le soutien indéfectible de certaines puissances, espérait pousser le Conseil à adopter une résolution qui réglerait définitivement le conflit en faveur de sa position expansionniste en quelques mois", souligne le Front Polisario.