Les maladies rares posent un dilemme majeur en santé publique en raison de la difficulté à les diagnostiquer rapidement, de l’absence de traitements efficaces pour la plupart, de leur impact dévastateur sur les patients et leurs familles, et du manque de connaissances scientifiques et de prise en charge coordonnée. Bien qu’individuellement rares, ces maladies touchent collectivement un grand nombre de personnes, créant un fardeau économique et social important.
En effet, du fait justement de leur rareté, ces maladies ne bénéficient pas de programmes de recherche conséquents afin de leur trouver un remède, car les laboratoires pharmaceutiques, qui recherchent la rentabilité avant tout, ne veulent pas engager des budgets importants pour trouver des médicaments efficaces pour des malades qui ne sont pas nombreux.
Le manque de sensibilisation du public et de connaissances médicales a conduit à une sous-estimation importante du fardeau que représentent ces maladies pour nos systèmes de santé et les personnes qui en sont atteintes. Selon le décompte des milieux médicaux, il existe un peu plus de 7.000 maladies rares dans le monde. En Algérie, de 4 % à 6 % de la population est atteinte de ces maladies. Considérant que le nombre d’habitants se situe entre 46 et 47 millions, le nombre de patients souffrant de maladies rares avoisinerait les 2 millions d’habitants, sans tenir compte du facteur de consanguinité. Conscient de la situation, le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a souvent souligné la nécessité de prendre en charge les problèmes de tous les citoyens, quels qu’ils soient et où qu’ils soient. A titre illustratif, la liste des maladies rares et leurs traitements pris en charge par l’Etat a été portée de 32 à 109 maladies à travers l’arrêté du 6 novembre 2024, modifiant et complétant l’annexe I de l’arrêté du 6 février 2013 fixant les listes des maladies rares et des pathologies à pronostic vital ainsi que les produits pharmaceutiques destinés à leur traitement. La Caisse nationale des assurances sociales des travailleurs salariés (CNAS), a annoncé par le biais de son directeur-général adjoint, Dr Khaled Khedim, une évolution exponentielle des dépenses de remboursement des frais de soins qui ont atteint 2,7 millions de dollars par an.
Il est utile de signaler que l’Algérie est le seul pays en Afrique à consacrer un budget aussi important aux maladies rares. Il s’agit d’un budget conséquent reflétant un effort de l’Etat envers les malades, même si cela reste insuffisant en raison de la cherté des traitements, dont certains coûtent des dizaines de milliers de dollars. D’où la nécessité d’un plan pour les maladies rares, comme il y a eu, il y a quelque temps, un plan pour les cancers. A ce titre, ce plan est en phase d’élaboration, sous l’égide du ministère de la Santé, par un groupe de spécialistes confrontés aux malades au quotidien. De quoi susciter beaucoup d’espoir pour des centaines de milliers de malades dans le désarroi. Ce plan préconise notamment la généralisation du dépistage néonatal au plus grand nombre possible de maladies rares, une formation spécialisée pour tous les généralistes afin qu’ils puissent détecter les maladies rares, l’acquisition d’appareils de dépistage génétique, l’ouverture de centres de référence où les maladies seront identifiées et les malades orientés vers les structures de prise en charge adéquates (parcours de soins), la mise sur pied d’une plateforme numérique nationale pour assurer le suivi des malades partout en Algérie et la prise en charge des traitements et médicaments nécessaires pour stabiliser les maladies. L’adoption et l’activation de ce plan sont d’autant plus impératives que des malades décèdent sans même savoir qu’ils sont malades, alors qu’une détection à temps aurait pu les sauver.